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Visite de Notre-Dame de Paris
10 octobre 2025
| Avec cette proposition de visite, Solange a rencontré un franc succès, et reçu de nombreuses demandes. Nous étions 19 inscrits, accueillis au portail Nord par le frère Bertrand, l’un des dix chapelains de la cathédrale, ce qui impliquait que nous aurions droit à une visite protocolaire (à l’instar des grands de ce monde et des têtes couronnées) ! |
Sur le parvis, nous avons très vite compris notre chance, groupés que nous étions en-deçà des barrières de sécurité, et donc loin de la foule. Notre guide nous l’a confirmé : la cathédrale accueille l’équivalent d’un autocar par minute, et la présence d’un chapelain ne peut être réservée qu’aux heureux élus !
Deux principes régissent ces visites : la gratuité, à laquelle ils tiennent, se conformant d’ailleurs en cela à la loi de 1905, et la liberté : « on ne demande pas aux gens s’ils viennent visiter ou prier ». Il nous apprend aussi qu’il voit « chaque jour un Paul Claudel touché par la grâce ».
Un peu d’histoire La construction de la cathédrale est lancée en 1163 sous l’impulsion de l’évêque Maurice de Sully, sur l’emplacement de l’ancienne église Saint Étienne. Le parvis est désormais très vaste, mais à l’origine Notre Dame n’était pas faite pour être vue de loin ; en effet, peu de gens savaient lire et « la façade est un livre ouvert qui explique la présence de Dieu dans la vie quotidienne ».
La façade (sans les tours) est un gros cube qui représentait notre monde, avec des rosaces dont le cercle évoquait l’infini. Elle est percée de trois portails : le portail de la Vierge, celui du Jugement Dernier et celui de la mère de Marie.
Le frère Bertrand nous glisse malicieusement que Jésus a donc du sang breton par sa grand-mère Sainte Anne.
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Il nous décrit ensuite les sculptures du portail de la Vierge : Des trois séries de 14 rois de la Bible, Notre-Dame n’en a gardé que deux, donc 28 monarques bibliques, auxquels la Révolution, focalisée sur le mot « roi » a coupé la tête. |
Sous les statues des rois, celles des saints, Saint Denis avec sa tête dans les mains, Saint Jean-Baptiste et ses moutons, Saint Marcel tenant les clés de Paris…
Et, évidemment, les scènes de la vie de la Vierge Marie, en particulier sa dormition, et sa présence au ciel près de son fils.
Nous entrons, un peu éblouis par la magnificence du lieu, toujours en « groupe protocolaire » privilégié.
« La façade nous parle de Dieu, il est logique de trouver le baptistère à l’entrée », nous dit notre guide, et nous pouvons effectivement dès notre arrivée admirer une croix d’or jaillie des flots, également en or, contenus dans une vasque en bronze. Datant de la restauration après l’incendie, il est conçu, comme l’autel, par le sculpteur Guillaume Bardet ; il remplace un baptistère mobile, et sa nouvelle place à l’entrée est très symbolique de l’importance donnée au baptême : « on ne nait pas chrétien, on le devient, contrairement à ce qui se passe dans d’autres religions comme chez les juifs ou chez les musulmans ». Notre-Dame n’étant pas une paroisse, il y a très peu de baptêmes, et quasiment pas de mariages, un seul cette année entre des artisans qui se sont connus lors de la restauration.
| Sur le premier pilier gauche, la statue de Notre-Dame des étudiants réalisée en 1722 par Antoine Vassé, et dont notre guide adore le gentil sourire. |
Particularité : il y a trois portails et cinq nefs. Nous sommes à la fin du roman, au début du gothique qui permet à la lumière d’entrer par de grandes ouvertures ; il faut pour cela une grande maitrise des formes et des pressions, d’où le nombre de nefs et de piliers, qui assurent la sécurité du bâtiment. La tension des piliers est si forte qu’on les entend vibrer lorsqu’on les frappe.
L’incendie de 2019 Contrairement à ce qui se dit parfois, seul le toit a vraiment brûlé. Lorsque la flèche est tombée, crevant la voûte, le feu est entré et s’est propagé aux chaises en paille, mais il y a eu peu de dégâts : la chaire en bois (réalisée en 1868 par Mirgon sur les dessins de Viollet-le-Duc) n’a pas brûlé. Précision : la chaire est au milieu et non dans le chœur, car il n’y avait à l’évidence aucune sonorisation à l’époque, et, si les prières de la messe sont connues de tous et n’ont donc pas besoin d’être bien entendues, en revanche sermons et homélies changent sans cesse…
Les pompiers sont intervenus très rapidement et ont pris la bonne décision de ne pas attaquer le feu directement mais de créer une barrière d’eau pour le stopper. Il y avait deux énormes trous dans le toit, de 15 m x 15 m. Il a fallu déverser des tonnes d’eau !
Du plomb a coulé partout, une goutte est tombée dans la main du Christ et ils l’y ont laissée, seule trace de l’incendie. Tout est clair et lumineux sur les trois étages. La restauration exceptionnelle a permis de nettoyer, outre les traces de l’incendie, la noirceur d’une pollution accumulée depuis un siècle et demi (précédente restauration).
Au XIIIe siècle, lors d’un élargissement de l’édifice, « les murs ont été repoussés » et des chapelles sont ajoutées autour des collatéraux, formant ainsi des doubles bas-côtés et un double déambulatoire autour du chœur, une configuration unique dans l’architecture religieuse médiévale.
| Lors de la restauration le parcours de visite a été entièrement réaménagé en parcours de la foi. Les 29 chapelles, qui ont retrouvé leurs couleurs, ont été renommées et remaniées et les œuvres d’art qui leur étaient associées redistribuées. |
Nous remontons la nef de gauche où nous suivons (toujours hors de la foule dense) l’allée de la Promesse, jalonnée de chapelles dédies à ceux qui annoncent le Christ, Noë, Abraham, Moïse, David, Salomon…
Les Mays de Notre-Dame : chaque année (nous sommes au XVIIIème siècle) les confréries offraient au mois de mai un grand tableau représentant des scènes bibliques (vie de Paul, de Pierre). Il y a ainsi 76 grands tableaux, qui se trouvent pour la plupart dans les musées nationaux ; il en reste une vingtaine dans les chapelles.
Les tentures : elles sont en cours d’exécution ; 1 m2 de tenture demande un an de travail par tapissier et chaque tenture fait 16 m2 ; elles arriveront donc d’ici 4 ou 5 ans. En attendant, des tapisseries (en rapport avec la foi) sont prêtées, telle celle de Georges Braque.
Et nous arrivons au transept
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Les rosaces du transept sont de véritables joyaux. La disposition des quartiers sur la base de pierres étaient faites pour donner à l’œil l’impression de les voir tourner. Mais la rosace Sud ayant donné des signes de fragilité, on l’a fait pivoter pour la solidifier, elle repose désormais non sur un quartier mais sur un axe en pierre vertical. Les vitraux du XIIIème sont d’origine. L’incendie n’a rien brûlé. C’est plutôt la tempête récente qui a fait des dégâts.
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La statue dite Notre-Dame de Paris est connue dans le monde entier. C’est à ses pieds que Paul Claudel a rencontré la foi. Trouvée dans la chapelle Saint Aignan, elle date du XIVème siècle et a été installée dans la cathédrale au XVIIIème. Elle a été laissée intacte, de justesse (50 cm), par l’effondrement du toit.
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Nous poursuivons, pour contourner le chœur par la gauche.
Le déambulatoire Après la Promesse, la plénitude de la Révélation avec l’Incarnation : voilà le thème du déambulatoire. Sur la clôture du chœur (qui permettait de ne pas avoir trop froid), une frise sculptée retrace la vie du Christ, de la Nativité au nord, les mystères joyeux, aux apparitions du Ressuscité au sud, les mystères glorieux. Il manque deux mystères, pour un problème de place.
| La couronne d’épines du Christ est conservée dans la châsse-reliquaire de la chapelle axiale. Elle a été acquise par le roi Louis IX au XIIIème siècle pour une somme atteignant la moitié des revenus du royaume. Elle est montrée aux fidèles tous les premiers vendredis du mois. |
Le chœur : les stalles en chêne sculpté du XVIIIème ont noirci mais n’ont pas brûlé ; pas plus que la statue de Louis XIII (Guillaume Coustou) et de Louis XIV (Coysevox), qui n’ont été décapitées ni l’une ni l’autre ; mais l’Orgue de Chœur (Boisseau-Cattiaux, XXème) a été touché, contrairement au Grand Orgue (XVIIème-XXème), dont il a fallu cependant démonter et nettoyer les 8.000 tuyaux.
Les deux grands personnages de la cathédrale
Victor Hugo : à son époque la cathédrale n’était plus guère connue, mais son « Notre-Dame de Paris », roman historique publié en 1831 et qui connait un succès immédiat, l’a sortie de l’oubli. Le frère Bertrand affirme en souriant qu’il dîne chaque soir avec Quasimodo.
Viollet-le-Duc décide alors de mettre son art au service de la cathédrale, qu’il sauve de son état de décrépitude, pour en faire un chef d’œuvre. Il n’est pas question pour lui de nettoyer ou entretenir, mais de restaurer, n’hésitant pas à remplacer, créer, imaginer.
Il remplace la flèche qui avait été rasée un siècle auparavant car elle devenait dangereuse par une flèche en chêne recouverte de plomb. Les grandes statues de bronze des apôtres qui la flanquent regardent Paris, sauf Saint Thomas (qui a la tête de Viollet-le-Duc). Les statues ont été par hasard retirées pour restauration 3 jours avant l’incendies et donc sauvées.
Ce travail colossal de l’architecte qui, malgré quelques erreurs, fera de Notre-Dame de Paris un monument célèbre dans le monde entier, lui prendra vingt ans.
Et notre guide nous laisse là, nous incitant à nous promener pour découvrir les autres chefs-d’œuvre.
| Le frère Bertrand, notre guide « protocolaire » s’est d’emblée montré cordial et chaleureux : « vous êtes chez vous, dans une maison », nous a-t-il dit, il nous a même confié, au cours de cette déambulation d’une heure et demie, quelques bribes de sa vie (originaire du XIIème arrondissement de Paris, il est devenu moine, a officié à Lourdes et est devenu il y a 8 ans chapelain à Notre-Dame) ; et surtout, il a tenté de nous communiquer son amour pour ce magnifique monument. |
Françoise Gicquel
- Au XIIème siècle, Paris ayant vu sa population plus que doubler, l'évêque Maurice de Sully décide d'agrandir la cathédrale romane Saint- Etienne. La construction du nouvel édifice, commencé en 1163, s'étalera sur deux siècles. En 1190, le roi Philippe-Auguste décide lui aussi d'agrandir la capitale avec une nouvelle enceinte fortifiée, créant le grand Paris d'alors.
- En 1239, alors qu'elle est loin d'être achevée, Notre-Dame accueille une précieuse relique, rapportée par Saint-Louis : la couronne d'épine du Christ. Au cours des siècles suivants, l'édifice connaît une série d'aménagements et de restaurations.
- A la Révolution, devenue propriété de la Nation, la cathédrale est pillée et vandalisée. Mise en vente en décembre 1793, elle échappe de justesse à la démolition, avec la chute de Robespierre.
- Napoléon la sauve provisoirement en signant avec le pape le Concordat, qui permet la reprise du culte catholique. Il y est sacré Empereur en décembre 1804. Mais après 1815, l'édifice est tellement délabré que sa démolition est sérieusement envisagée.
- Son véritable sauveur est Victor Hugo avec son roman Notre-Dame de Paris, publié en 1831. L'auteur y décrit sa vision romantique d'un Paris médiéval, en faisant de la cathédrale sa principale héroïne. L'accueil du roman est élogieux, sauf pour l'Eglise catholique, qui le met à l'index !
- En 1845, on en confie la restauration à Eugène Viollet-le-Duc, qui s'entoure des meilleurs architectes et sculpteurs. Celle-ci va durer près de 20 ans. L'ancienne flèche du XIIIème siècle ayant été démontée au XVIIIème siècle par sécurité, Viollet-le-Duc en crée une nouvelle, haute de 96 mètres. Haussmann en dégageant le parvis offre une belle perspective. La cathédrale sera épargnée lors des deux guerres mondiales.
- Notre-Dame est aujourd'hui l'un des monuments les plus visités d'Europe. Lorsque le 15 avril 2019 un incendie entraîne la chute de la flèche et détruit la toiture et plusieurs voûtes, l'émotion est considérable dans le monde entier. Toute la nuit des centaines de pompiers luttent pour empêcher l'effondrement des deux tours. Le défi de la reconstruire en 5 ans sera tenu. Depuis sa réouverture le 8 décembre 2024, des millions de visiteurs s'empressent de la redécouvrir, plus belle que jamais.